lundi 28 juin 2010

J - 36 - Les élections

Fiou... Le départ approche à grande vitesse!

Pardon pour cette absence de 2 semaines, j'ai rencontré quelques problèmes personnels qui m'ont partiellement handicapé. Mais maintenant, tout va pour le mieux !

Nous sommes actuellement en Pologne au beau milieu des élections présidentielles, suite au drame de Katyn, il y a déjà deux mois et demi (oui, oui, le temps passe trop vite !), qui avait vu le décès du président, sa femme et 94 personnes dont certaines étaient très connues (prêtres, politiciens, officiers des armées, anciens de Solidarnosc, etc.).

Vous n'êtes pas sans savoir, puisque grâce à moi maintenant vous êtes passionné(e)s par la Pologne, que le premier tour s'est déroulé le dimanche 20 juin, au terme duquel les candidats Komorowski et Kaczynski ont gagnés leur place pour les quarts de fi... Euh, pour le second tour. (Pardon, mais aux vues des informations françaises, j'ai tendance à confondre foot et politique.)

Kaczynski d'abord. Son parti : Droit et Justice (ça donne le ton). Il est arrivé second avec 35% des voix (approximativement). Il est le frère cadet de feu-Lech Kaczynski, président polonais pendant 4 ans, et qui avait lui même œuvré à la libération polonaise au sein du syndicat Solidarnosc. On conviendra que les deux frères sont des sociaux-conservateurs. En effet, tandis que le programme social est assez développé, l'économie et les mœurs se cantonnent davantage au conservatisme. J'en veux pour exemple les affirmations quasi-homophobes de Kaczynski (Lech) quand il était maire de Varsovie. Ou bien leur refus de toute reconnaissance de l'homosexualité. Bref, quelque chose de presque impossible en France.

Komorowski, ensuite. Son parti : Plateforme civique. Il est arrivé premier avec 41% des voix. Depuis le décès de Lech Kaczynski, il a assuré l'intérim, en sa qualité de président de la Diète. Sa politique est légèrement plus libérale, donc moins sociale, mais au point de vue des moeurs, ça reste tout à fait conservateur: interdiction du mariage homosexuel, interdiction des recherches à l'aide de cellule souche, de l'euthanasie, etc. Il en faveur de l'adoption de l'Euro et de la privatisation des entreprises (contrairement à Kaczynski).

Ci-dessous, une carte représentant les 379 "Powiat", en fonction de quel candidat est arrivé premier. Orange: Komorowski, libéral / Bleu: Kaczynski, conservateur



Bon tout ça, qu'est-ce que ça nous donne ? Qu'est-ce que ça traduit ?

Premièrement, on notera que les deux sont de droites, ce qui donne un score de plus de 75% à la droite polonaise (sans compter les plus petit partis comme la Ligue des Familles Polonaises, ou bien le parti Autodéfense - tous deux avaient formés une coalition quelques années plus tôt avec le PiS, le parti des Kaczynski). On aurait du mal à imaginer un tel score dans nos pays de l'ouest européen... Mais pourquoi ? Hein ? Pourquoi la droite est-elle si imposante dans ce pays ?

Plusieurs réponses possibles, et valables, dont deux sont les plus évidentes:

1. La main-mise de l'Eglise sur la politique.
Notons que la Pologne, contrairement à la France est un pays encore très catholique, ce qui explique bien sur les positions de ces deux partis en ce qui concernent les moeurs. (Mais si je peux rassurer certains d'entre vous, la jeune génération polonaise va bien changer d'ici quelques années). Aucun parti ne peut avoir l'espoir d'être au pouvoir sans l'appui de l'Eglise. Le dimanche, à l'église, y'a du monde - ça change de la France.
N'oublions pas une autre chose, la population polonaise est - par l'ingérence d'Hitler il y a une 50aine d'années - un pays sans minorité importante. Alors tandis que notre pays se déchire dans des duels intestinaux entre blancs/noirs/arabes, catho/musulmans/protestants/juifs/laïcs, la Pologne, elle, se réunit sous des notions communes de blancs catholiques de type WASP.
Enfin, une dernière chose, qui nous permettra par ailleurs de continuer sur le second point, c'est que l'Eglise a joué une part importante dans la lutte contre le communisme, et a de ce fait constitué une culture commune, un refuge jusqu'il y a très récemment - seulement le temps d'une génération à peine.

2. La défiance vis à vis du socialisme.
Effectivement, le socialisme, le communisme, que nous réunirons sous le terme de "gauche" - bien que parfois frères-ennemis, a fait beaucoup de mal à ce pays, libéré par lui-même en 89/90 du joug communiste. Précision: le pays était considéré comme pays satellite de l'URSS, mais indépendant. Bref, cette histoire encore fraîche, constitue un argument muet de la droite sur la gauche et reçoit un accueil favorable, bien que diminuant, de la part de la population.
Alors bien sûr, la gauche socialiste polonaise ne souhaite pas réinstaurer de dictature, mais tentez d'en parler à des gens ayant vécu ce que "La Vie des Autres" nous décrit... C'est la raison pour laquelle je parle en terme de "génération" et non pas en années. Car c'est au fur et à mesure des générations que ce sentiment s'estompera, comme estompa notre sentiment de défiance vis à vis des allemands... - Ce qui n'est pas le cas pour encore beaucoup de polonais, ceci dit.

Deuxièmement, il faut bien sûr relever le taux d'absentéisme de 45%... Comment se fait-il qu'un pays, après 50 ans de dictature, n'aie pas confiance en la démocratie ? (Parce que bon, nous, je peux comprendre quelque peu)

Hé bien, la Pologne était "libre" de 1945 à 1989, voyons. Et des élections y étaient organisées ! Bon... Sans qu'il n'y ait beaucoup de candidats de l'opposition (comprenez : "Non-communistes"), voire qu'ils soient interdits de se présenter... De ce fait, on peut imaginer que la génération ayant vécu ces fraudes électorales n'ait qu'une confiance timide en la démocratie...
Je vois la deuxième raison dans ce que j'ai pu ressentir chez mes amis polonais : Au delà des partis, ce sont les candidats qui ne sont pas spécialement appréciés (imaginez un duel Bayrou, Noël Mamère au second tour, je suis pas convaincu que beaucoup de monde irait voter, ou alors, à reculons, comme lors d'une certaine année 2002).

Hé bien, tout ça mijotait dans mon cerveau depuis quelques jours, il fallait que je l'établisse "sur papier".

Verdict de ce duel - la finale - dimanche 4 juillet, au terme duquel nous saurons quelle voie la Pologne suivra ces 5 prochaines années: S'ancrera-t-elle davantage dans un avenir européen, ou bien se complaira-t-elle dans sa volonté de souveraineté ?

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